La blesure de néant : naître en colère
Une blessure de l'inconscient spirituel
(-) Dans le sein maternel, chacun fait l’expérience de la paternité de Dieu (plan spirituel). Dès le sein maternel, stocké dans une forme d’inconscient spirituel, tout homme sait qu’il est enfant de Dieu et qu’un canal invisible le relie à ce Père infiniment aimant. Ainsi, « Dieu donne l’être, le mouvement et la vie. » (Ac 17, 28). Le désir de connaître ce Père et d’avoir une existence filiale en dépendance d’amour avec Lui est ainsi inscrit dans le cœur de tout homme.
(-) Une agression subie par le tout-petit suscite 'une épouvante d’annihilation’ - « Je suis sans protection, sans Dieu, réprouvé. Je n’existe pas ! Je n’ai pas droit à l’existence ! ». On peut y voir une réactivation de l’angoisse de séparation originelle ('le péché originel'). Cela blesse profondément l’expérience fondatrice de la paternité de Dieu. Le canal qui relie à la source de la Vie est rétréci. La crainte de revivre une telle expérience est un terreau qui orientera et façonnera l’existence. Dès lors, certains fondements de la vie sont sapés : la représentation de Dieu et de soi sont déformées :
1- Dieu est ressenti comme ambigu, cruel, pervers, mauvais, etc. Son amour est suspecté. Le doute est semé : « Il m’a rejeté, placé dans un monde hostile, abandonné à moi-même. Lorsque Dieu s’approche, je me sens condamné. » L’existence est perçue comme un enfer, une souffrance, une punition.
2- L’image que chacun reçoit de soi, étant donné qu'il « est créé à l’image de Dieu », est falsifiée. Elle est désormais un miroir déformant. L’identité spirituelle (‘Je’), propre à chacun et qui lui sert de référent au fil de l’existence pour le déploiement et l’intégrité de son identité personnelle et sexuée, devient un référent faussé (un connaissance de soi inconsciente eronnée). Il y a inscrit dans le cœur profond comme un mensonge identitaire qui empêche de vivre selon l’être de don que chacun est appelé à devenir. L’identité spirituelle n'atteste plus la réalité de l'être de la personne. La guérison nécessitera une prière de retournement, c'est-à-dire une prière de réajustement de ce qui est faussé, afin de restaurer les fondements de la vie.
(-) Représentation de Dieu altérée. Le désir d’une dépendance d’amour fait place à une sourde colère contre Dieu, pas toujours explicite, et une révolte contre l’acte créateur par lequel il nous appelle à l'existence : « Je n’ai pas choisi de naître ! » Évidemment, Dieu a toujours été présent, le cœur en colère ne peut le percevoir. La capacité d’accueillir la vie fait place dans l’inconscient à un refus de la vie : choix du néant - choix de mort : « Je ne veux pas être là, je refuse d’exister ». Le tout-petit se replie sur lui, dès le sein maternel.
(-) Représentation de soi altérée : La blessure de néant se situe dans le cœur-esprit, au niveau même de l’accueil de l’Esprit et de la Vie, qu’il y ait ou non répercussion psychologique. Les répercussions peuvent être masquées par un bon système de défense psychique. Le mensonge jeté sur Dieu et soi va faire rechercher la vie du côté du néant. Voulant fuir la souffrance, on fuit la vie et on se précipite dans son opposé.
Les quatre signes de la blessure de néant
Le diagnostic se base sur l’intuition spirituelle et la présence simultanée de quatre symptômes ‘inscrits dans les cellules’. Ce n’est pas la sévérité des signes psychiques qui permet d’asseoir le diagnostic :
Angoisse : peur viscérale d’être annihilé, de ne pas être vivant. Le bras de Dieu semble trop court pour retenir. « Le sol s'est effondré sous mes pieds. »
Solitude (ontologique) : infinie, totale, éternelle. Vide froid. Abandon constitutif : être sans Dieu. Pas de lieu de sécurité, pas de place pour soi, pas de sentiment d’appartenance, ni d’exister pour soi. Absence et peur d’être en relation. Se sentir sans famille et déshérité. Sentiment douloureux d’enfermement en soi-même : « Je suis enfermé en moi-même, et personne ne peut rien pour moi ; et je ne peux rien faire pour les autres. » Dieu est infiniment lointain et désintéressé de soi. Ce 'être orphelin' se traduit par :
- Sentiment d’inutilité
- Fermeture : anorexie - mutisme
- Sentiment douloureux d’enfermement
- Anesthésie affective : je ne ressens aucun amour pour mes proches
Mensonge identitaire : L’image de soi (JE) est une auto-référence déformée qui empêche d’accéder à la ressemblance divine (trouble de l’identité). La conscience de soi altérée mène à l’autodestruction : une forme de refus de la vie sans suicide, car celui-ci ferait retomber dans les mains du Dieu cruel. Les signes en sont :
- Flotter : pas de lien avec le passé, ni de prise sur le futur ;
- Blessures de l’identité sexuée ;
- Refus du corps, du fait d’être incarné ;
- Choix de mort : drogues, alcool, tomber constamment malade ou être sujet aux accidents;
- Haine de soi : guerre intestine, une partie de soi rejette l’autre partie. L'enfant en nous, celui que nous avons été, est mal-aimé et rejeté.
Désespérance (de soi) en deçà-même des émotions mais menant à une mésestime profonde, un défaut d’affirmation saine de soi, un sentiment d’être moins qu’humain, d’avoir une existence dépourvue de sens : « Je ne vaux rien, je suis fini depuis longtemps, pourquoi s’intéresser à moi ? je n’existe pas ! » Doute radical sur la possibilité de s’en sortir.
Le diagnostic ne se base pas sur la cause car une même cause peut produire :
- Atteinte spirituelle : blessure de néant avec ou sans répercussion psychique
- Atteinte psychique : blessure d’abandon sans blessure de néant.
Dévoiler la colère contre Dieu et le refus de la vie
- La révolte contre Dieu est démasquée losqu'il est demandé de prier un des textes suivants :
- Is 45, 9-13 / Jr 18, 1-6 / Jn 1, 1-18 / Dt 30, 15-20 / Si 15, 11-20 / Ps 139
- Le refus de la vie par ces questions :
- Que penses-tu de « Tu aimeras ton prochain comme toi-même. »
- Si le choix t’est donné optes-tu pour aller jusqu'au bout de ta vie ou rejoindre le ciel, que choisirais-tu ?
- Peux-tu dire que tu t’aimes : un peu, beaucoup, pas du touts ?
- La prière « Choisis la vie »
- Les pensées secrètes
- Tu es au ciel, Jésus te demande : « Veux-tu descendre sur terre pour moi ? » … Que répondrais-tu ?
- Choisirais-tu de naître des mêmes parents ou en choisirais-tu d'autres ?
- Où te sens-tu chez toi ?
Lorsque la blessure a été contractée dans le sein maternel
L’angoisse est parfois ressentie comme une douleur autour du nombril. C’est le lieu où, de manière fantasmée, la détresse maternelle est entrée en soi. De là, la détresse a été ressentie comme un flot noir qui s’est répandu en soi. La partie livrée au flot noir a été abandonnée et s’est détachée (clivage), tandis que le reste du corps, considéré comme bon, s’est retranché et se protège. Si tout le corps a été envahi par le flot noir, la personne perçoit s’être réfugiée dans le crâne. Certains décrivent que leur crâne a été envahi, et que leur 'moi' s'est échappé par l’arcade sourcilière ou le sommet de la tête. Le moi est hors du corps. Le corps est laissé sans existence, sans énergie, sans étincelle de vie. Les personnes parlent comme d’un clou, d’une épée qui perce leur corps en son milieu.
La blessure d’abandon
voir la fiche correspondante (en construction)
Bibliographie sommaire
« La blessure de la vie : renaître à son identité » - Philippe Madre - Ed. des Béatitudes
« La guérison des blessures reçues dans le sein maternel » - Nelly Astelli - Ed. Saint-Paul
« Le tout-petit » - Luc Lannoye - Ed. Fidélité
« Maman ne me quitte pas ! » - Bernadette Lemoine – Ed. Saint-Paul
« Un cri secret d’’enfant » - Anne Schaub-Thomas - Ed. Les acteurs du savoir